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Au fond, en surface ou loin des mines, les métiers autour des chevaux, les équipements. Les chevaux des mines (10).

D 6 avril 2013     H 22:47     A Traitgenevois     C 0 messages


Les mines vont employer de nombreux matériels pour transporter le charbon à l’intérieur ou à l’extérieur des galeries.
Nous avons déjà vu divers moyens utilisés.
Les wagonnets, berlines auront des formes et de contenances très variées selon les compagnies.
Dans les mines de la Loire au début du 19ème siècle, une berline contenait environ 200 à 240kg de minerai.
Au milieu de ce même siècle le wagon de Mr Cabany, utilisé dans les mines d’Anzin (Nord), peut transporter approximativement 440 kg de houille (5.5 hectolitres).
En 1867, à Epinac, les mulets de Zulma Blanchet tirent une charge utile qui varie de 400 à 500kg.
 A la fin du siècle, le docteur Boissier donne 800kg de charge utile aux wagons utilisés à Alès.
Vers 1925,le docteur Delleau indique une charge de houille de 550kg dans les wagonnets en usage dans le Nord.
 
Les matériaux et la conception de ces wagonnets évolueront sans cesse.(Photos 1 à 4 )
Ces berlines sont attelées aux équidés de diverses manières.
Voici la méthode décrite en 1836 dans les mines de la Loire :
"Les chevaux sont attelés ordinairement à une benne à laquelle les deux traits sont attachés, il vaut mieux pour qu’ elle ait plus de stabilité lier les deux traits à un bâton dont le milieu porte un crochet qui s attache à l’ avant de la benne."
Deux méthodes seront principalement employées pour tracter les berlines :
 
Le "tracier" comme ici à la Mine de La Ricamarie (Loire) © Collection Yves Paquette.
 
 
Le palonnier autoporté comme sur cette autre vue prise dans une galerie de roulage.© Collection Yves Paquette.
 
 
Roues coulées d’une seule pièce employées à Anzin par Mr Cabany. L’espace annulaire est ondulé et ne mesure que 5mm d’épaisseur pour un diamètre total de 34cm. Géologie appliquée. Exploitation des mines. Amédée Burat. Paris 1855.
 
Pour les wagonets, un grand diamètre de roues est souhaité pour diminuer le tirage, mais c’est au détriment du poids du wagon . Des solutions sont recherchées pour diminuer ce poids mort sans compromettre la solidité de la roue.
Ces roues de grand diamètre ne doivent pas non plus surélever de manière trop importante le centre de gravité du wagonnet.
 
Des essais sont faits avec des roues folles afin de diminuer le frottement dans les courbes et donc l’effort demandé aux chevaux. Mais cela se fait à l’encontre de la stabilité en ligne droite.
La distance entre les essieux fera elle aussi l’objet de nombreux tâtonnements.
 
Musée de La Machine.
Le collier sera le plus employé dans la plupart des mines. Ce collier est sans tête pour ne pas heurter les parties basses des galeries ou les portes. (Photo 5)
 
Utilisée dans certaines mines, la bricole sera cependant le plus souvent réservée aux chevaux blessés au garrot par les portes d’aérage , les parties basses de certains passages ou par des pièces métallique (Photo 6). Mais ce sont surtout les flancs et les jambes qui sont les plus exposés.
 
Selon les endroits,les chevaux sont menés au cordeau ou à l’aide de guides. L’habitude aidant, leur utilisation est rare, les chevaux apprenant au fil du temps ce qu’ils doivent faire. Cependant leur présence est obligatoire dans le harnachement et leur absence peut entrainer une amende. (1)
Les traits peuvent être en corde, en chaîne, parfois en cuir.
Le harnachement est toujours le même pour chaque cheval.
 
Tous ce matériel doit être entretenu. Les compagnies embauchent leurs propres bourreliers. L’atmosphère poussiéreuse de la mine est très abrasive. Un collier ne dure en moyenne pas plus de 4 ans. Le reste des harnais est soumis aux chocs sur les parois étroites de certaines galeries.
 "De quoi donner du travail à 7 ou 8 bourreliers salariés de la compagnie minière, pour 600 chevaux à Montceau-Les-Mines entre les deux guerres" (1)
L’humidité et la poussière demandent un bon entretien de la part du personnel. Un collier usé ou en mauvais état va blesser le cheval qui le porte.
 
Les charretiers ou les palefreniers vont prodiguer à leurs chevaux un à trois pansages par jour . Le musée de La Machine signale l’emploie, en cas blessure par frottement, d’une pommade à l’oxyde zinc .
A. Deleau indique qu’un seul palefrenier suffit pour l’entretien de 18 chevaux .
Mais les vétérinaires déplorent souvent un pansage négligé préjudiciable à la santé des équidés.
 
Les palefreniers peuvent être amenés à coucher au fond, près des chevaux à des fins de surveillance.
Ce sont généralement eux qui sont chargés de l’entretien des harnais dans les puits. Ils distribueront également la nourriture. Leur tâche est donc importante dans la bonne gestion de la cavalerie souterraine.
Les chevaux des mines étaient tondus pour éviter les problèmes liés à la transpiration et aider à un meilleur pansage. La tonte s’effectuait en automne. Il était recommandé de ne pas tondre trop ras afin que les frottements du harnais ne provoquent des irritations de la peau à cause de l’atmosphère poussiéreuse de la mine. Les chevaux sont généralement tondus en chasse.
La ration alimentaire était alors augmentée.
 
Note de ferrage. Musée de La Machine.
Nous avons déjà vu le rôle des maréchaux-ferrants. Ils seront la plupart du temps salariés à la mine, mais parfois extérieurs à celle-ci.
 Leur travail s’effectue en surface pour les chevaux qui travaillent sur le carreau. Dans ce cas le ferrage est fait à chaud. Pour les chevaux du fond, le maréchal possède en surface des modèles des fers de chaque cheval. Les fers seront forgés à l’extérieur et posés à froid au fond de la mine.
Le maréchal assure un important service de surveillance et de premiers soins dans l’attente du vétérinaire.
Il assume aussi très souvent le rôle de forgeron et répare les outils.
Il faut noter que dans son rapport du 10 juillet 1851, Mr Sénéchal, chargé par les actionnaires de faire un rapport sur les mines d’Epinac, relève que les forgerons réparent les outils des ouvriers à leurs frais avec retenues sur leur salaire.
 
Le vétérinaire occupe une position centrale pour ce qui concerne l’utilisation des chevaux dans les mines.
Il a bien sûr la charge de la santé des équidés, mais c’est également lui qui souvent assiste le service approvisionnement pour l’achat des chevaux ou les sélectionne lui même.
Il a sous son autorité toute l’équipe de soins aux chevaux. Il décidera de la ration que les palefreniers distribueront aux chevaux.
Il va intervenir en collaboration avec le maréchal-ferrant pour les soins des sabots en cas de problème de pieds.
Il va en outre déterminer les mesures de prophylaxie à appliquer dans les écuries.
 
 
Sa tâche est donc très importante. Maintenir les chevaux en bonne forme était capital pour les sociétés minières. Tout cheval blessé ou retiré provisoirement du circuit diminue la capacité du roulage dans les galeries et occasionne souvent un surcroit de travail aux chevaux restants.
Il ne faut pas oublier, comme charge pour les vétérinaires, les chevaux qui œuvrent sur le carreau et ne sont pas moins importants pour la mine jusqu’à l’arrivée massive des moyens locomoteurs thermiques ou électriques.
 
Les vétérinaires ne chômaient pas. A Hénin-Beaumont dans le Pas-de-Calais, le docteur Leleu est en charge de 450 chevaux. (1).
Ils consignent les blessures occasionnées aux chevaux dans des cahiers. (Photos 7 à 9)
Les vétérinaires peuvent aussi se consacrer à des mesures et des calculs comme nous l’avons déjà vu.
 
 
Mines d’Aniche. Découvert en 1778, le charbon y fut extrait jusqu’en 1984 date de la fermeture de la fosse Barrois.© Collection Yves Paquette.
Les chevaux des mines ne travaillaient pas seulement au fond des puits. Le carreau les employait aussi en grand nombre. La contrainte de la hauteur ne s’appliquant pas hors des galeries, ce seront les chevaux les plus grands qui y seront utilisés.
 
Carreau de la mine de La Buscalie. Aveyron.© Collection Yves Paquette.
Les manœuvres de gare seront souvent leur lot et ils auront à tirer de lourds wagons pour les mener, par exemple, à la pesée. Leur travail est des plus pénibles et requiert un grande habilité de la part du meneur ; le cheval devra souvent démarrer sa charge à plusieurs reprises sur un trajet d’une centaine de mètres.
 
 
Puits Dolomieu à Roche-la-Molière. Une cinquantaine de puits étaient recencés sur cette commune située entre St Etienne et Firminy. L’exploitation s’étendra, avec des fortunes diverses, de 1820 à 1980. © Collection Yves Paquette.
 
Prise de remblai à la mine de Cransac, Aveyron. © Collection Yves Paquette.
Ils serviront en outre à tous les travaux de la mine nécessitant une force de traction : entretien des routes, transport de matériaux divers, prise de remblai, amenée des fourrages etc...
 
 
Les métiers qui se rattachent à la mine peuvent se trouver loin des gisements houillers. C’est ainsi qu’il faut approvisionner les mines en bois pour étayer les galeries.
Le sapin et le pin seront le plus couramment utilisés. La forêt des Landes fournira son contingent de lots de bois pour les mines. Loin des mines, ce seront des mulets qui participeront à l’effort général. (Photos 10 et 11 ).
 
Le transport du charbon va mobiliser des moyens terrestres et fluviaux. Le charbon va alimenter les grands centres industriels gros consommateurs d’énergie. La métallurgie sera souvent associée aux mines. Les mines de La Machine par exemple, propriété de la famille Schneider, seront intimement liées aux aciéries du Creusot.
Le charbon est en même temps très employé dans les industries plus légères et le chauffage domestique. il va devoir être acheminé vers les centres urbains par voies ferroviaires (photos 12 et 13) ou fluviales ( photos 14 et 15) principalement. Il faudra ensuite le distribuer vers les revendeurs et les particuliers. ( photo 16 )
 
Le développement de l’utilisation charbon va donc entrainer une série de bouleversements techniques, économiques et sociaux.
 
 
A suivre.
 
(1) D’après le livre "Les chevaux de mine retrouvés" de Sylvain Post (avec la participation du docteur Pascale Kientz-Lahner et de Jacques Urek), disponible en libraire, sur commande aux Ed. De Borée Diffusion.
 
(2) Légendes des photos 8 et9 -Mules et Mulets des animaux d’exception- Eric Rousseaux- Geste éditions-2003.
 
Reproduction des photos et textes strictement interdite sans autorisation.

Les cartes postales du portfolio sont issues de la collection de Mr Yves Paquette.

 

Les cartes postales du portfolio sont issues de la collection de Mr Yves Paquette.

Portfolio

  • 01 . La mine de fer du Fraysse (Tarn) fermera en 1931. Les chevaux sont (...)
  • 02 . Montceau-les-Mines. Berlines métalliques. Date probable de timbrage : (...)
  • 03 . St Etienne. Berlines en bois. On distingue bien le palonnier (...)
  • 04 . Convoi de transport du fond de la mine pour l'acheminement du (...)
  • 05 . Ce cheval porte un collier sans tête sur lequel est fixé la lampe de (...)
  • 06 . Tirage à la bricole. Le soutènement en bois a la forme trapèzoïdale (...)
  • 07 . Blessure de la jument Etincelle au puits des Minimes, mine de La (...)
  • 08 . Blessure du cheval Acanthe au puits Marguerite, mine de La Machine (...)
  • 09 . Le suivi vétérinaire du cheval Buffalo. Mines de Trélys (Cévennes) . © (...)
  • 10 . Mules. Lors du remplacement des boeufs par les mules, les utilisateurs (...)
  • 11 . ...il porte dans sa partie centrale, fixée aux montants, une pièce (...)
  • 12 . Paris. Gare des Gobelins. Cette gare fut construite à la fin du 19ème (...)
  • 13 . La gare des Gobelins était reliée à la voie ferrée de petite ceinture qui (...)
  • 14 . Sur cette carte datée de 1906, ce sont des boeufs qui viennent à quai (...)
  • 15 . Société des Charbonniers réunis. Le quai de La Loire, à Paris, est situé (...)
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