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Au commencement étaient les voies d’eau. Les chevaux de halage (2).

D 19 avril 2014     H 17:30     A Traitgenevois     C 0 messages


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A quelle époque un (ou une) de nos lointains ancêtres a-t-il eu l’idée, en voyant dériver un objet sur une rivière, de se servir de l’eau pour se déplacer ? Difficile de le dire.
Les plus anciennes traces de bateaux ont été découvertes en Europe du Nord et datent du mésolithique, un période qui s’étend de -10000 ans à -5000 ans avant J.C. (1)
De manière naturelle, les rivières constituent un vaste réseau de communications.
Ce réseau fut utilisé par les peuples de la préhistoire et de l’antiquité.
Bateau égyptien de la XIIème dynastie (-1991 à - 1780 avant J.C. Document Wikipédia. Auteur de la photo : Unforth.)
Plusieurs millénaires avant notre ère, les égyptiens maitrisaient parfaitement la construction navale.
En Chine les travaux de construction du Grand canal commencèrent au Vème siècle avant J.C.
Les échanges commerciaux sur les voies d’eau iront en s’amplifiant au cours des siècles. Utilisées par les peuples celtiques qui résidaient en Gaule, les rivières ont permis aux romains de développer leur commerce après la conquête du territoire par Jules césar .
Les romains vont commencer à aménager les berges des rivières, à construire des digues et à creuser des canaux (fosses Mariennes,canal de Narbonne à la mer).
Le moyen âge va développer les échanges par voie fluviale.
Les problèmes surgissent dès qu’il faut passer de la rivière d’un bassin à la rivière d’un autre bassin. Il faut alors décharger la marchandise et l’acheminer par voie terrestre jusque à la rivière du bassin contigu et de nouveau la charger sur un autre bateau. D’où pertes de temps et d’argent.
Entre le XVème et le XVIème siècle, deux inventions vont révolutionner la manière d’envisager la navigation fluviale et apporter une solution à la communication entre bassins sans rupture de charge :
L’écluse à sas et le canal à bief de partage.
Ces inventions vont permettre de construire la voie d’eau proche de l’idéal, c’est à dire à caractéristiques maitrisées. Les canaux et aménagements vont désormais se développer rapidement.
Pont-canal de Briare. Construction 1890 -1896. Image issue du blog La Batellerie.
Commencé en 1602 et terminé en 1640, le canal de Briare, commandé par Sully, relie le bassin de la Seine à celui de la Loire. C’est le premier canal à bief de partage construit en France.
Le canal du midi est creusé entre 1666 et 1681, la construction du canal de St Quentin s’échelonne de 1728 à 1776, celle du canal de l’Ourcq s’étend de 1802 à 1825.
Le canal de Berry. Image issue du blog La Batellerie.
La réalisation du canal de Berry est achevée en 1840.
A la fin du XIXème siècle, ce sont plus de 12000 kilomètres de canaux et rivières qui sont ouverts à la navigation.
Les voies navigables vont se définir par plusieurs caractéristiques.
Parmi celles-ci, la largeur, le tirant d’eau, le tirant d’air (hauteur sous les ponts) mais aussi par le gabarit des écluses..
A l’origine, le canal de Briare n’a un tirant d’eau que de 0m59 et certains passages ne permettent pas le croisement de deux bateaux (2). Il faudra attendre 1830 pour que le canal soit approfondi et que la taille des écluses soit portée à 31m de long et 5m20 de large.
Le canal de Nantes à Brest. L’écluse de Boju, dans le bas de l’échelle d’écluse de Rohan. Image issue du blog Histoire et patrimoine des rivières et canaux.
Inauguré en 1858, le canal de Nantes à Brest est un canal à petit gabarit. Ses écluses sont dimensionnées à 27m50 par 4m50. Le tirant d’eau est de 1m60 et le tirant d’air de 2m40.
Le canal de Berry est lui aussi à petit gabarit. Les écluses font 27m75 par 2m70, le tirant d’eau est de 1m25 et la hauteur libre de 2m60.
D’autres canaux ont des dimensions supérieures et certains des dimensions inférieures.
Ces différences de dimensions révèlent une situation qui n’est pas aussi satisfaisante que pourrait le laisser penser le développement important du réseau.
Dan son ouvrage (3), François Aulagnier pointe en 1841, les dysfonctionnements et erreurs techniques du réseau national.
Les dimensions des écluses ne sont pas identiques, ni sur un même canal ni à fortiori sur des canaux différents.
Sur le canal de Bourgogne, il note que 5 écluses sont de dimensions inférieures aux 186 autres.
Il remarque de notables différences entre les ouvrages des différent canaux : sur le canal du centre les écluses font 27m70 par 4m70 alors que sur le canal de Bourgogne elles sont dimensionnées à 30m40 par 4m (encore que, nous l’avons vu, 5 soient plus petites).
Le canal du centre n’a un tirant d’eau que de 0m85 à 1 mètre.
Un mauvais entretien provoque l’envasement de biefs qui sont trop souvent de largeur insuffisante. Une alimentation déficiente de ces biefs amène à un tirant d’eau réel inférieur à celui annoncé.
Le tirant d’air sous les ponts est très variable.
Il relève également un entretien des plus relâché sur certains canaux.
Précisons que ces canaux sont aux mains de sociétés privées qui bénéficient de concessions pour l’exploitation et l’entretien de ces voies d’eau. Et visiblement pour certaines compagnies, l’exploitation compte plus que l’entretien.
Il est aisé de déduire les entraves à la navigation que vont provoquer ces divers problèmes techniques : rupture de charge, arrêt de la navigation, accidents etc...

Charles Louis de Freycinet. Document Wikipédia.
Charles Louis de Freycinet va tenter de remédier à cet état de fait en proposant de standardiser les dimensions des écluses. Elles seront portées à 39m de long pour une largeur de 5m20.
Cette norme devient le gabarit Freycinet et constitue toujours le gabarit européen de classe 1. Les canaux, mais pas tous, seront réaménagés dans ce sens. Le canal de Briare sera de nouveau amélioré pour satisfaire à cette nouvelle norme : les écluses seront portées aux dimensions Freycinet et le tirant d’eau amélioré.
Actuellement, 5800km de voies fluviales françaises se conforment à ce gabarit.
Si sur les canaux les caractéristiques de tirant d’eau et d’air sont fixes ou à peu près, il n’en est pas de même sur les fleuves et rivières. Ces voies navigables peuvent, par exemple, avoir un tirant d’eau variable selon la saison.
Les canaux ne présentent pas les mêmes conditions de navigation que les rivières. Le courant y est généralement faible ou inexistant (quoique le canal de l’Ourcq par exemple présente un courant de 2 à 3km/h). Sur les fleuves et rivières, la force et la direction des courants peuvent varier, les crues et inondations modifier considérablement la géographie du cours d’eau et des ses abords.
Toutes ces données vont avoir une influence très importante sur les bateaux mais aussi sur les techniques de halage et sur les équidés qui vont être amenés à haler ces bateaux. Nous verrons dans le prochain article comment les chemins de halage ont évolué au fil du temps.
Aujourd’hui Voies Navigables de France gère 3800km de canaux et 2900km de rivières. D’autres voies navigables sont sous la responsabilité d’établissements publics ou de collectivités locales.
Cette rapide présentation n’a d’autre but que de planter le paysage dans lequel les mariniers et les chevaux vont devoir vivre et travailler.
Nous n’entrerons pas plus avant dans l’histoire et la description des ces voies navigables. Il existe de nombreux blogs et ouvrages qui détaillent fort bien cette partie de la batellerie.
A suivre.
La peinture de la vignette, "Le quai de la ville à Béthune", est l’œuvre de Mr Claude Delcloy
Un certain nombre de textes et d’illustrations sont reproduits ici avec le consentement de leurs auteurs ou propriétaires. Merci de ne pas les utiliser sans autorisation.
Vous êtes un spécialiste de la batellerie ; si vous relevez une (ou des) erreurs(s) dans cet article ou dans les suivants, merci de m’en avertir. Un petit message de votre part peut éviter de propager une inexactitude.
(1)La navigation fluviale ancienne.
(2) A propos du canal de Briare par R. Dion. Persée.
(3) Études pratiques sur la navigation du centre, de l’est et du nord de la France. Par F. Aulagnier. Carillan-Goery et Vve Dalmont, libraires. Paris. 1841.
Un blog où vous trouverez l’histoire du canal du midi.

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