Un franc d’amende à M., conducteur du cheval « Zut » et à M. J ; , conducteur du cheval « Vermouth », pour avoir fait traîner à ces chevaux quinze berlines au lieu de dix ou douze, et avoir accroché des chaînes à leur collier, malgré la défense qui en a été faite. Il est en effet aisé de comprendre que ces surcharges blessent les épaules et les écorchent.
Fosse n° 2. Deux francs d’amende au conducteur du cheval « Bourrin » qu’on a laissé marcher, étant déferré, ce qui a occasionné une boiterie du pied.
Trois francs d’amende au conducteur du cheval « Cassis », pour avoir abandonné son cheval, qui s’est sauvé et s’est blessé grièvement le front contre le toit.
Fosse n° 4. Deux francs d’amende au conducteur du cheval « Papillon », blessé à la tête.
Fosse n° 7. Deux francs d’amende à M.V. pour avoir fait traîner à son cheval « Paravent » 17 berlines au lieu de 12 ou 10.
Deux francs d’amende au conducteur du cheval « Alpha », pour avoir forcé ce cheval, ce qui a occasionné une boiterie du membre postérieur gauche.
Nous vous prions de bien vouloir, en outre, infliger des blâmes sévères aux palefreniers-chefs, porions et chefs-porions, dans le service desquels ces accidents sont arrivés, et de donner de nouveau des instructions à tout le personnel afin que les chevaux soient traités avec plus de douceur, plus de précautions et plus d’intelligence, de façon à éviter tous ces accidents qui finissent par constituer des pertes ». (4)
Cependant nous verrons plus loin qu’il est un peu facile de n’incriminer que les mineurs comme responsables de tels manquements.
Il y a aussi des mines qui récompensent le bon traitement des chevaux. Tout n’est donc ni tout noir ni tout blanc.
La relation que tisseront hommes et chevaux variera selon les époques et les compagnies.
Un vieux mineur du bassin de La Mure nous contait que le matin, au moment du briquet, il partageait son pain avec son cheval après l’avoir trempé dans son vin rouge.
D’autres partageaient leur tabac à chiquer.
Certains chevaux entretenaient avec leur meneur une véritable complicité dans le travail. C’était le cas de Max.

Dessin Jacques Urek (4). © Sylvain Post.
Jacques Urek raconte son histoire au puits Vouters à Merlebach.
"...Une fois Max m’a surpris ; j’ai eu une peur bleue : j’étais en train de casser la croûte et le bruit du ventilateur m’empêchait d’entendre autre chose, quand soudain une tête est passée sur mon épaule...Le cheval a happé le "briquet" et l’a terminé tranquillement.
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"Max était le plus intelligent. Quand, sur un chantier, on faisait du béton, il était plus facile de vider la berline en la couchant sur le côté, hors de ses rails. Le cheval comprenait la manœuvre effectuée au moyen des chaînes. Et si à la place des chaînes , on lui disait de pousser la berline avec son arrière train, il s’exécutait de bonne grâce.On arrivait ainsi à lui faire culbuter des berlines de gravier et de ciment pour le bétonnage. Il réagissait au centimètre près. Un vrai phénomène" (4).
Le cheval, comme sur la photo 5 le cheval Négro, devient un compagnon important que l’on présente à ses amis ou à sa famille.
Souvent il est aussi la principale compagnie du charretier au fond de la mine. Si l’entente est bonne, il aidera le jeune galibot à supporter les ténèbres de la mine.
Beaucoup de mineurs souligneront la parfaite adaptation de leur cheval à son travail.
De telle sorte qu’il n’y a pratiquement plus d’ordres à lui donner. Il connait sont travail.
Le poste terminé, bien que ce soit interdit, il regagnera son écurie tout seul.
Cette entente n’était pas toujours la règle on s’en doute. La dureté du travail rejaillissait sur les rapports hommes/chevaux. Certains chevaux étaient dociles et bien adaptés à leur travail, d’autres, pour diverses raisons, posaient problème.
Claude Virot dans son ouvrage " Chevaux de la mine, anges ou démons" fait le récit de son travail au fond avec des chevaux. Et si plusieurs d’entre eux lui donnèrent satisfaction, un autre lui causa de nombreux soucis en raison d’un caractère difficile.(8)
Les chevaux comptaient-ils les berlines ? Cette question a fait couler beaucoup d’encre et de salive !
Et le fait est que de nombreux témoignages rapportent que tel cheval se refusait à tirer plus que son lot de wagonnets.
En recoupant les dires de plusieurs meneurs, il semble bien que le cheval finissait par mémoriser le nombre de claquements que faisaient les chaînes entre berlines en se tendant au démarrage.
Certains ont alors pensé à induire leurs animaux en erreur en protégeant le métal avec des chiffons pour rendre le départ silencieux. Et il semble, à ce qu’ils disent, que ce stratagème ait fonctionné.
Au fil des épopques, le cheval va occuper une place importante dans la vie des mineurs. Nous verrons dans un autre article les relations, parfois difficiles, qui se sont tissées au cours du temps.
A suivre.
(1) L’histoire de la mine de La Machine-Mémoire de la mine-Etudes et documents N°11-2008-Conseil général de la Nièvre.
(2) Historique de mines de Rive-de-Gier- M.A. Meugy- Carillan-Goeury et Dalmont- Paris 1848.
(3) Mémoires et compte-rendus de la société scientifique et littéraire d’Alais. Alais 1895. Ernest Boissier.
(4)(1)D’après le livre "Les chevaux de mine retrouvés" de Sylvain Post (avec la participation du docteur Pascale Kientz-Lahner et de Jacques Urek), disponible en libraire, sur commande aux Ed. De Borée Diffusion.
(5) L’histoire de la mine de La Machine. La Machine, un brassage des cultures par François Martin. Études et documents. Conseil général de la Nièvre. 2008.
(6) Le bassin houiller de La Mure.Clovis-Henri Angelier. Revue de géographie alpine
Année 1940.
(7) Centre historique minier/Lewarde.
(8) Claude Virot. " Chevaux de la mine, anges ou démons". Collection "Mémoire de la mine et des mineurs du bassin de Blanzy". Association La mine et le hommes .Blanzy.
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Les cartes postales du portfolio sont issues de la collection de Mr Yves Paquette.